Ce jour-là, au lendemain de l’arrestation de Patrice-Emery Lumumba dont on attendait l’arrivée à Stanleyville (Kisangani) et conscient qu’il ne le reverra plus, Antoine Gizenga, qui avait réussi à quitter Léopoldville (Kinshasa) après le premier coup d’état de Mobutu de septembre 1960, s’autoproclama Premier ministre de la République Populaire du Congo (séparatiste). Si Patrice Lumumba avait réussi à atteindre Stanleyville, sûrement que l’histoire du Congo (et probablement celle de l’Afrique Centrale) aurait pris une autre direction. Très vite, le gouvernement séparatiste d’Antoine Gizenga gagna du terrain. Il parvint à conquérir le Kivu, une partie du Katanga (Manono), rafla le Sankuru et s’empara même de Luluabourg (Kananga) pour un temps : des représentants du gouvernement de Stanleyville s’établirent dans ces fiefs, tels Laurent-Désiré Kabila dans le territoire de Fizi, Marandura et Casimir Mbagira dans la plaine de la Ruzizi, Kashamura à Bukavu, Soumialot et Nicolas Olenga au Sankuru et au Maniema. Ce gouvernement fut reconnu par 21 pays d’Afrique, d’Asie, et d’Europe de l’Est. Des pays frontaliers comme le Burundi, le Soudan, l’Ouganda, le Congo-Brazzaville, la Tanzanie accueillirent des représentants du gouvernement de Stanleyville et autorisèrent l’ouverture des ambassades et consulats dans certaines de leurs villes.
Mais très vite, les lumumbistes seront caractérisés par des luttes intestines, parfois sanglantes et une désunion remarquée. En février 1961, certains leaders des partis lumumbistes (dont Kamitatu Cléophas et Gbenye) exigèrent que soit organisée une assemblée générale pour désigner un “successeur légal” de Lumumba. Mais à l’issue du “Conclave de Lovanium” (auquel Gizenga n’avait pas pris part) organisé en août 1961, la plupart de lumumbistes portèrent leur choix sur Antoine Gizenga. C’est ainsi qu’il fut nommé (dans le nouveau gouvernement d’union nationale de l’après Lumumba), vice-premier ministre du gouvernement de Cyrille Adoula. Mais il fut destitué quelques temps après, puis emprisonné jusqu’en 1964 sur l’île de Bula Mbemba à l’embouchure du fleuve Congo. Il ne fut libéré qu’en juillet 1964 par le nouveau Premier ministre, Moïse Tshombe. C’est aussi à ce moment-là qu’il créa le Parti lumumbiste unifié (Palu). Mais quelques mois après, il fut de nouveau arrêté, puis placé en résidence surveillée pendant 14 mois jusqu’au coup d’Etat de Mobutu du 24 novembre 1965. C’est là qu’il prit le chemin de l’exil et resta pendant 27 ans (de 1965 à 1992) en dehors du pays; tour à tour à Moscou, en Angola, puis au Congo-Brazzaville.
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